La plus grande transition énergétique au monde est en cours en Chine.

L’auteur Li Yunqi est journaliste à CGTN Radio, spécialisé dans l’évolution des habitudes de consommation chez la jeune génération chinoise, les développements du secteur ESG et les tendances culturelles. Il apporte également des éclairages sur les dynamiques géopolitiques et économiques des relations sino-américaines.

L’année dernière, 2,4 billions de kilowattheures d’électricité ont été transférés de l’ouest vers l’est de la Chine — suffisamment pour alimenter cinq fois l’Allemagne.

Plus de 80 % de cette électricité provenait de sources propres et renouvelables, résultat du projet de transmission électrique Ouest-Est de la Chine, l’une des initiatives énergétiques les plus ambitieuses et transformatrices au monde aujourd’hui. Depuis son lancement, ce projet a redéfini le paysage énergétique national en acheminant d’immenses quantités d’énergie propre depuis les régions occidentales riches en ressources vers la côte orientale, densément peuplée et industrialisée — parcourant des milliers de kilomètres, franchissant montagnes, déserts, rivières, et atteignant plus de 500 millions de personnes dans des métropoles comme Shanghai, Guangzhou et Pékin.

Le projet a été officiellement proposé au début des années 2000 et est devenu un pilier de la stratégie nationale de développement en 2001. Il est né d’un déséquilibre structurel : la Chine orientale, qui concentre l’activité économique et la demande électrique les plus élevées du pays, manque d’espace et de conditions naturelles pour produire de l’énergie renouvelable à grande échelle. En revanche, les régions occidentales — Xinjiang, Qinghai, Yunnan, Mongolie intérieure — regorgent de ressources solaires, éoliennes et hydroélectriques, mais ont historiquement souffert d’une faible demande locale et d’un manque d’infrastructures pour distribuer cette énergie à l’échelle nationale.

La Mongolie intérieure est en tête du pays pour l’énergie éolienne, avec plus de 86 gigawatts de capacité installée, ce qui en fait la plus grande base éolienne de Chine. À Qinghai, le parc solaire écologique de la préfecture de Hainan — l’un des plus vastes au monde — s’étend sur le plateau à haute altitude avec une capacité installée de 15 gigawatts. Parallèlement, le Yunnan et le Sichuan jouent un rôle majeur dans la production hydroélectrique, exploitant leurs rivières rapides et leur relief accidenté.

À l’inverse, les villes de l’est, bien qu’étant le moteur économique de la Chine, sont denses, industrielles et énergivores. Les méga-régions comme le delta du Yangtsé et le delta de la rivière des Perles abritent les pôles manufacturiers et urbains les plus productifs du pays. Ces zones ont longtemps dépendu du charbon et, jusqu’à récemment, avaient un accès limité à l’énergie renouvelable abondante produite à l’ouest, laissant une grande partie de celle-ci sous-utilisée. Les lignes de transmission Ouest-Est serpentent à travers la brume matinale et les montagnes de l’Anhui, le 30 mai 2025.

Ce décalage entre les lieux de production d’énergie propre et les zones de consommation n’est pas propre à la Chine. Partout dans le monde, les centres urbains et côtiers sont les plus demandeurs en énergie, mais rarement situés dans des régions riches en ressources renouvelables. La réponse de la Chine à ce dilemme a été de relier physiquement le pays grâce à des autoroutes électriques longues distances et à haut rendement.

Combler ce fossé énergétique profitera non seulement à la Chine, mais contribuera également à la transition mondiale vers une énergie plus propre.

Ce qui rend ce transfert d’énergie possible, c’est le développement et le déploiement par la Chine de la technologie de transmission à ultra-haute tension (UHV). Contrairement aux lignes électriques classiques, les lignes UHV peuvent transporter de l’électricité sur des milliers de kilomètres avec très peu de pertes. La Chine a commencé à investir dans la recherche UHV au début des années 2000 et détient aujourd’hui plus de 80 % des brevets mondiaux liés à cette technologie. Fin 2023, le projet de transmission Ouest-Est comptait 39 corridors UHV longue distance, formant un réseau interconnecté qui fonctionne comme les artères vertes du système électrique national.

Forte de son succès domestique, la Chine a également commencé à partager sa technologie UHV avec le monde.

« La Chine est disposée à travailler avec la communauté internationale pour renforcer globalement la coopération énergétique, garantir la sécurité énergétique, lutter contre le changement climatique, protéger l’environnement écologique et promouvoir le développement durable, afin de mieux servir les peuples du monde entier. » — Président chinois Xi Jinping

La technologie UHV de la Chine commence déjà à s’imposer au-delà de ses frontières. Plus tôt cette année, la filiale brésilienne de State Grid China a officiellement lancé un projet de transmission UHVDC ±800 kV dans le nord-est du Brésil, marquant le troisième projet UHV international de State Grid. Ce projet intégrera l’énergie éolienne, solaire et hydroélectrique des régions nord-est et nord du Brésil, la transmettant à travers les États du Maranhão, du Tocantins et du Goiás pour alimenter Brasília et ses environs — desservant une population d’environ 12 millions d’habitants.

Ces projets internationaux démontrent non seulement la fiabilité technique et l’efficacité des systèmes UHV chinois, mais reflètent aussi un engagement croissant en faveur de la connectivité énergétique mondiale et du développement bas carbone.

Le projet de transmission électrique Ouest-Est de la Chine prouve que l’énergie propre n’a pas besoin de rester là où elle est produite. Avec un mélange d’ambition, d’innovation et d’infrastructures, l’énergie renouvelable peut franchir montagnes, déserts et mégapoles — et illuminer des nations entières. Alors que le monde cherche des solutions à la crise climatique qui s’accélère, la superautoroute énergétique de la Chine offre un modèle audacieux de ce qui est possible.