Cinquante experts africains - parmi lesquels des professeurs d’université, des directeurs d’instituts de recherche et des présidents de think tanks - ont participé au séminaire sur la modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique, tenu du 17 au 24 juillet 2025 dans la province du Shaanxi, en Chine. De retour dans leurs pays respectifs, plusieurs participants ont accepté de contribuer à notre rubrique « Trois questions aux participants du séminaire de Xi’an ». Aujourd’hui, nous sommes avec le Représentant du Burundi, Monsieur Frédéric MANIRAMBONA.
Bonjour Monsieur Frédéric MANIRAMBONA ! Vous êtes le Représentant du Burundi au séminaire de Xi'an sur " La modernisation à la chinoise et le développement de l'Afrique". Présentez-vous et dites-nous, quelles sont vos impressions au sortir de ce grand rendez-vous de mise en œuvre des six objectifs principaux et des dix Actions de partenariat stratégique entre la Chine et l'Afrique ? Je suis Frédéric MANIRAMBONA, Maître-Assistant à l’Ecole Normale Supérieure (ENS), l’une des grandes institutions publiques d’enseignement supérieur du Burundi à vocation académique et pédagogique. C’est aussi l’une des institutions qui a eu le privilège d’être logée dans l’un des bâtiments gigantesques du pays construits avec le financement du Gouvernement de la République Populaire de Chine dans le cadre de la coopération bilatérale entre nos deux pays. Dans la Section d’Histoire où je preste, les cours d’Histoire contemporaine retiennent mon attention. Je m’intéresse beaucoup aux relations internationales et plus particulièrement à celles entre la Chine et les pays africains. Le « Séminaire sur la modernisation à la Chinoise et le développement de l’Afrique » a été une précieuse et spéciale occasion pour moi. D’abord, ce séjour du 17 au 24 juillet 2025 a été mon tout premier voyage dans ce « pays-continent » que j’ai trouvé bien organisé, hospitalier, laborieux et très innovant. Ensuite, ça été une occasion pour moi d’enrichir les connaissances que j’avais sur l’Empire du milieu et de témoigner sur base de mes propres observations lors des différentes conférences, visites de terrain et des immersions le niveau de sa modernisation notamment dans les domaines de l’agriculture, de l’industrie, de l’énergie, du tourisme, des technologies et des infrastructures socio-économiques. Enfin, j’ai pu aussi réaliser que la Chine, un pays alors sous les dominations étrangères et en voie de développement comme l’Afrique et devant nourrir l’une des premières populations mondiales a de quoi inspirer nos pays africains et plus particulièrement le mien. Il est donc d’une importance capitale que les deux peuples conjuguent leurs efforts pour explorer régulièrement ensemble les voies et moyens pouvant faciliter les échanges d’expérience, les apprentissages et la collaboration dans les domaines qui les intéressent.
Quelles propositions avez-vous pour une coopération sino-africaine plus proche des peuples, vue de Burundi ? Concernant la coopération sino-burundaise, permettez-moi d’abord de vous dire que depuis l’établissement de leurs relations diplomatiques en 1963, la République du Burundi entretient d’excellentes relations d’amitié et de coopération avec la République Populaire de Chine et ces dernières n’ont cessé d’atteindre leur plus haut niveau de l’histoire surtout en périodes de crises qu’a connu notre pays. Cela témoigne de la confiance mutuelle et de la volonté commune de bâtir un avenir meilleur. Pour que cette coopération soit beaucoup plus proche des besoins des populations burundaises, nous proposons de mettre l’accent sur trois volets en l’occurrence l’agriculture, l’exploitation minière et la coopération décentralisée. Pour le premier, il importe de souligner que depuis son accession à la magistrature suprême en 2020, le cheval de bataille de Son Excellence Evariste Ndayishimiye, Président de la République du Burundi est que « Chaque bouche ait à manger et que chaque poche ait de l’argent». La majeure partie de la population burundaise vit grâce aux activités agro-pastorales et notre pays dispose de beaucoup de potentialités dans ce domaine (climat favorables, terres fertiles, abondance d’eau,…). Le transfert du savoir-faire chinois en ce qui est surtout de l’augmentation de la productivité et des transformations agro-alimentaires pourrait permettre au Gouvernement du Burundi de nourrir à sa satiété ses 12,5 millions de populations et exporter le surplus. Pour le second volet, le Burundi dispose d’un sous-sol riche en différents types de minerais qui pourrait être utilisés comme matière première pour alimenter l’industrie chinoise. La coopération gagnant-gagnant dans ce domaine pourrait permettre au Burundi de faire entrer dans ses caisses beaucoup de devises combien nécessaires dans ses importations voire constituer un levier important pour équilibrer sa balance commerciale. Quant au troisième volet, je vous dirais que depuis 2025 le Burundi entreprend des reformes administratives où un accent particulier est mis sur la décentralisation des entités locales notamment les communes. Sur ce volet, la coopération décentralisée permettrait aux populations à la base de sentir cette confiance réciproque et cette volonté commune de bâtir un avenir meilleur entre nos peuples. Par ailleurs, le Burundi vit dans la region des Grands lacs, une région troublée par des crises répétitives. Ainsi, pour mieux asseoir le principe sacro-saint de respect mutuel et de non-ingérence dans les affaires internes, combien important pour la durabilité des relations entre nos deux pays, une coopération militaire à l’ère des nouvelles technologies est d’une importance capitale.
Que pensez-vous de l'initiative du Groupe de réflexion de Xi'an pour un suivi du séminaire de Xi'an ? La création du Groupe de Réflexion de Xi’an est une initiative louable qui incarne à mon avis l’avenir même du partenariat entre la Chine et les pays africains à deux niveaux. D’un coté en tant qu’Africains représentants nos pays respectifs, le groupe nous unira davantage par les échanges réguliers d’expérience à travers tous les coins de notre continent. D’un autre côté, l’issu des différents rencontres et échanges permanents sur la coopération sino-africaine pourra inspirera voire même éclairera les leaders de nos pays sur les orientations à suivre et ainsi constituer le socle de renforcement de la coopération sino -africaine.
Propos recueillis par Héribert-Label Élisée ADJOVI / Envoyé spécial à Xi'an