Enseignements du séminaire de Xi'an : Abel Nyarko-Asomani du Ghana plaide pour une coopération sino-africaine inclusive

Cinquante experts africains - parmi lesquels des Professeurs d’université, des Directeurs d’instituts de recherche et des Présidents de groupes de réflexion - ont participé au séminaire sur "La modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique", tenu du 17 au 24 juillet 2024 dans la province du Shaanxi, en Chine. De retour dans leurs pays respectifs, certains ont accepté de répondre à notre série intitulée « Trois questions aux participants du séminaire de Xi’an ». Aujourd’hui, nous échangeons avec la Représentant du Ghana, Monsieur Abel Nyarko-Asomani.

Bonjour Monsieur Abel Nyarko-Asomani, vous êtes le Représentant du Ghana au séminaire de Xi’an sur « La modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique ». Présentez-vous et dites-nous quelles sont vos impressions après cette grande rencontre visant à mettre en œuvre les six principaux objectifs et les dix actions du partenariat stratégique entre la Chine et l’Afrique.

Je suis Abel Nyarko-Asomani, Chargé de recherche à l’Institut des Affaires Économiques (IAE), principal groupe de réflexion du Ghana. Depuis plusieurs années, l’Institut est à l’avant-garde de la promotion de la bonne gouvernance, de la démocratie et d’une économie de marché équitable dans le pays. Il a influencé et initié des lois et politiques publiques notables telles que la Loi sur le droit à l’information de 2019 (Acte 989), la Loi sur la responsabilité budgétaire de 2018 (Acte 982), la Loi sur la transition présidentielle de 2012 (Acte 845), etc. Depuis mon arrivée à l’Institut, j’ai mené des enquêtes telles que l’enquête semestrielle sur la confiance des entreprises et j’ai lancé l’enquête semestrielle sur la confiance des consommateurs. J’ai également participé aux analyses budgétaires pré et post-budget du pays, ainsi qu’aux activités de plaidoyer. En matière de recherche, je m’intéresse particulièrement aux questions macroéconomiques, au changement climatique, à la sécurité énergétique et au développement économique. L’amitié croissante entre la Chine et l’Afrique a également éveillé mon intérêt pour les relations internationales.

Le séminaire sur « La modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique » a été une opportunité exceptionnelle pour moi. Merci à l’Ambassade de Chine au Ghana. Mon séjour d’une semaine dans la province de Xi’an, du 17 au 24 juillet 2025, a été une révélation et une source de réflexion profonde. La Chine a identifié la nécessité d’assurer la sécurité alimentaire compte tenu de sa population élevée. Le pays a investi délibérément dans la chaîne de valeur de la production agricole, notamment à travers la Zone de démonstration de Yangling. En tant qu’individu ayant surtout connu l’agriculture paysanne comme pratique dominante au Ghana, j’ai été fasciné par l’application de la science et de l’innovation dans cet investissement agricole. L’Afrique peut s’inspirer de cette politique en accordant la priorité à des investissements significatifs dans l’agriculture. Le programme a également enrichi ma compréhension du développement, en particulier de la transition d’un pays sous-développé à un pays développé, comme l’a démontré la Chine. Mon inspiration vient de la transition phénoménale de la Chine, passée du statut de pays du tiers monde à celui de superpuissance. Il y a de l’espoir pour l’Afrique, compte tenu de notre amitié actuelle avec la Chine et de la coopération au développement dans le cadre des six grands objectifs de coopération.

Enfin, la récente politique de zéro tarif mise en place par le gouvernement chinois à l’égard de l’Afrique constitue une opportunité supplémentaire pour nous. Outre l’élargissement évident de l’accès au marché pour les exportations africaines, les infrastructures de connectivité renforcées en cours de réalisation dans le cadre de projets tels que l’Initiative « la Ceinture et la Route » renforceront également les liens de coopération entre l’Afrique et la Chine. Ce que je retiens des différentes leçons et visites de terrain auxquelles j’ai participé, c’est que le maillon manquant du commerce africain réside dans le respect des normes internationales, notamment avec nos partenaires commerciaux comme la Chine. Malgré cela, les diverses coopérations commerciales, notamment dans le domaine du commerce électronique entre la Chine et l’Afrique, permettront bientôt à l’Afrique de répondre aux standards des marchés mondiaux.

Quelles propositions avez-vous pour une coopération sino-africaine plus proche des populations, vue du Ghana ? Avec la position du Ghana en tant que pays démocratique stable et véritable carrefour régional du commerce, de l’agriculture et de la culture en Afrique de l’Ouest, tout programme de coopération sino-africaine ciblé améliorera les conditions de vie des Ghanéens. Premièrement, en gardant à l’esprit la Zone de démonstration de Yangling (ZDY), je proposerais de reproduire un tel projet au Ghana. Certes, le capital pourrait poser problème au départ, mais une version réduite de la ZDY à travers le pays pourrait améliorer la production agricole. Heureusement, le Ghana dispose de vastes terres arables et de ressources humaines abondantes. Une Zone de démonstration Ashanti dans la région Ashanti pourrait stimuler la production et la culture agricoles du pays. Cela permettrait de créer des emplois, d’augmenter les revenus des agriculteurs et, à terme, d’assurer la sécurité alimentaire du pays.

Deuxièmement, le secteur manufacturier du Ghana est dominé par les petites et moyennes entreprises (PME) à faible capacité de production. Cette faible production est due au coût excessif de la production, qui constitue un défi majeur pour elles. Pour y remédier, je propose la création d’un Parc industriel communautaire sino-ghanéen dans les villes du Ghana. Ce parc accueillerait la majorité des PME afin qu’elles bénéficient d’économies d’échelle en matière de partage de connaissances, de formation, etc. Le parc industriel serait également un centre de création d’emplois pour la jeunesse du pays.

Enfin, compte tenu des ressources naturelles abondantes du Ghana, de nombreux jeunes Ghanéens se lancent désormais dans des activités d’extraction de ressources. Parmi elles, l’exploitation minière illégale de l’or, connue sous le nom de Galamsey, est très répandue. Il est regrettable que la plupart des terres arables et des cours d’eau soient dégradés par ces activités. Il est donc urgent de préserver nos terres. Conscients du fait que les populations de ces communautés minières ont besoin d’emplois, je suggère la mise en place d’une Initiative communautaire verte Chine-Ghana. Cette initiative serait un outil de création d’emplois verts tels que la plantation d’arbres, des programmes de recyclage, des campagnes d’éducation publique et des start-ups pour offrir une alternative aux activités de galamsey et préserver l’environnement.

Que pensez-vous de l’initiative du Groupe de réflexion de Xi’an pour assurer le suivi du séminaire ? Le Groupe de réflexion de Xi’an est une initiative remarquable. Il servira de plateforme aux cinquante pays africains réunis lors du séminaire pour continuer à échanger et partager des idées en vue de collaborations et de projets de développement. Je crois que cette initiative servira d’outil pour transformer les idées du séminaire en projets de développement concrets entre les pays. Depuis l’indépendance, le Ghana est la porte d’entrée de l’Afrique. Notre ouverture et notre hospitalité resteront toujours notre marque de fabrique dans nos relations avec tous les pays. Le Ghana est toujours prêt à collaborer avec tous les pays pour garantir la paix mondiale et un développement durable.

Propos recueillis par Héribert-Label Élisée ADJOVI / Envoyé spécial à Xi'an